Marc Simon
LÀ – texte à lire à haute voix
Sans crier gare, elle commence tout d’abord par frôler. On voudrait l’attraper mais l’expérience nous a appris à la laisser vagabonder, à la laisser venir.
C’est toujours ainsi.
Elle se fait de plus en plus insistante, pour être de plus en plus présente
jusqu’à ce qu’elle soit LÀ .
Tout commence donc dans une certaine obscurité,
on tâtonne, on observe, on essaye, on fait, on désespère,
on refait, on s’en va, on revient.
Et ainsi de suite…
Peu à peu, on s’habitue à cette obscurité qui nous devient familière, qui finit même par nous réconforter.
On l’apprécie, on lui fait confiance et on avance.
On commence à se laisser bercer par ce qui nous entoure. Notre regard s’aiguise.
On distingue une pointe de lumière, qui, telle une luciole dans la nuit, semble irréelle.
Ça y est,
elle est LÀ .
On la sent, elle est palpable et ne nous glisse plus entre les doigts.
On l’a et elle ne nous échappera pas.
S’ensuit une danse sans queue ni tête, un corps à corps plus qu’un tête-à -tête.
On se lance dans la bataille en toute confiance. Il y a lutte, mais une lutte approuvée, respectée, obligée.
La rage est douce.
Déchirement, enlisement, fermeté, élasticité, impression, marquage, fusion s’enchaînent dans un tourbillon de gestes.
Et puis d’un coup tout s’éclaire, ou peut-être que non, peut-être que ça s’est fait petit à petit mais qu’on était ailleurs, concentré sur cette composition, concentré sur ce duo qui ne fait qu’un le temps de cet échange intense.
Tout est clair.
La touche finale est apportée par la palette de couleur.
Eclats chromatiques soulignant cette rencontre à la fois rugueuse et tendre.
Tout est LÀ …
Leïla Simon, 2017